Tout sur la procédure de destitution de Han Kuo-yu

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Tableau des différents scénarios possibles après le vote de la destitution de Han Kuo-yu (Illustration Valentin Floquet)

 

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Le samedi 6 juin sera organisé le tout premier vote de destitution concernant un maire de supermunicipalité à Taiwan. Han Kuo-yu (韓國瑜), maire KMT de Kaohsiung élu fin 2018, est en effet remis en cause par plusieurs initiateurs de cette procédure qui lui reprochent de s’être engagé dans la course à la Présidentielle quelques mois seulement après sa prise de fonction à la mairie de Kaohsiung.

Maire ou candidat à la Présidence ?

Pour un vieux parti politique qui peine à trouver un écho au sein de la société taiwanaise comme le KMT, Han Kuo-yu représentait un espoir, une étoile montante vue sa popularité aux élections municipales de Kaohsiung en novembre 2018. Entré en fonction à Kaohsiung le 25 décembre 2018, le nouveau maire a annoncé sa candidature à l’élection présidentielle dès le 21 mai 2019. Le mois suivant, le mouvement pour la destitution de Han Kuo-yu était lancé par les groupes civiques : We care et Citizens Mowing Action, le parti Taiwan Statebuilding Party et un médecin Chen Kuan-jung(陳冠榮).

Procédure de destitution en trois étapes

  1. Initiation du projet

La procédure requiert, dans le cas de la supermunicipalité de Kaohsiung, un minimum de 22 814 signatures, soit 1 % des votants.
25 décembre 2019 : Les initiateurs du projet ont présenté 30 000 signatures (dont 28 560 validées par la suite) afin d’enclencher une procédure de destitution.

  1. Collecte de signatures

La procédure requiert, dans le cas de la supermunicipalité de Kaoshiung, un minimum de 228 134 signatures, soit 10 % des votants.
9 mars 2020 : Les initiateurs ont présenté 406 886 signatures (dont 377 662 validées par la suite) au bureau des élections de Kaohsiung.

  1. Vote de destitution

Deux conditions requises :

  1. Le nombre de voix pour la destitution doit être supérieur au nombre de voix contre.
  2. Le nombre de voix pour la destitution doit atteindre le quota d’un quart du nombre d’électeurs de Kaohsiung. (Pour ce vote de destitution : 574 996 voix minimum, en se basant sur les 2 299 981 électeurs de la supermunicipalité)

 

L’après-vote de destitution du 6 juin

Cas de figure 1 : destitution approuvée

Si la destitution est approuvée, Han Kuo-yu sera le tout premier maire de Taiwan à être destitué. De toute l’histoire de la République de Chine, très peu d’hommes politiques ont été destitués. Seules des destitutions organisées à une petite échelle comme les villages ou communes ont été approuvées.

La commission centrale des élections doit annoncer officiellement la destitution dans les 7 jours suivant le vote et elle prend effet immédiatement. La date du 12 juin est déjà annoncée. Le gouvernement nomme un maire intérimaire.
La commission centrale des élections dispose de trois mois pour réorganiser une élection. Han Kuo-yu ne peut pas se représenter à l’élection municipale de Kaohsiung pendant quatre ans.

Si Han Kuo-yu intente un procès contre le résultat de la destitution, conformément à la loi, la commission centrale des élections ne peut pas organiser de nouvelle élection avant la fin du procès. Le procès comporte deux instances au maximum avec un délai de six mois pour chaque instance pour prononcer un jugement. Si Han Kuo-yu remporte le procès, la destitution est invalidée. S’il perd le procès, il est définitivement destitué.

 

Cas de figure 2 : destitution rejetée

Si Han Kuo-yu n’est pas destitué lors du vote du 6 juin, aucune nouvelle procédure de destitution ne peut être intentée contre lui avant la fin de son mandat.

 

 

Défense de Han Kuo-yu

Défense politique

Dans une défense écrite publiée mardi par la Commission centrale des élections (CEC), Han Kuo-yu a énuméré ses 15 réalisations depuis sa prise de fonction en décembre 2018 comme l’appel aux investissements, la création d’emplois ou encore la stimulation touristique dans la ville.

Défense auprès du tribunal administratif

Han Kuo-yu s’est d’ailleurs opposé à la décision de la commission centrale des élections d’organiser un vote de destitution auprès de la commission des recours administratifs. Le maire de Kaohsiung souligne que la campagne visant à le destituer a été lancée sept mois après son entrée en fonction. Tout le travail, de collecte, de vérification et d’emballage des signatures a été mené avant la fin de la première année de son mandat. Or, conformément à l’alinéa 1 de l’article 75 de la loi sur les élections, il est interdit de lancer une procédure de destitution avant le premier anniversaire d’entrée en fonction d’un maire.

La demande de Han Kuo-yu a été rejetée par la commission des recours administratifs qui estime que la loi ne définit pas la durée légale pour la collecte de signatures et que la procédure officielle de destitution a été lancée le 25 décembre 2019, soit le jour-même de la 1e année révolue de Han à la mairie de Kaohsiung.

 

Han Kuo-yu fait face à la deuxième destitution le concernant

En 1994, quatre députés du comté de Taipei (aujourd’hui Nouveau Taipei) du parti Kuomintang dont Han Kuo-yu ont soutenu le projet de construction de la 4e centrale nucléaire du pays. Les groupes anti-nucléaires avaient lancé une procédure de destitution collective. La loi sur les élections et les destitutions de l’époque disposait qu’une destitution n’était validée que si la moitié des électeurs participaient au vote et que la moitié des votants l’approuvaient.

A l’époque, 377 822 personnes avaient voté pour et 55 541 contre la destitution de Han Kuo-yu. Cependant, étant donné que le taux de participation n’était que de 21,36%, aucun de ces quatre députés n’avait été destitués.